traversées

Automne 2017 : je  regarde la porte de la maison de famille se fermer. Et je me remets à peindre. Je déroule de grands morceaux de toile.Comme à mon habitude, j’essaye de peindre sans intention. Je laisse venir. Ce qui vient est coloré, assez vif. De  grands cercles rompus par quelques traits, un visage apparaît. Le mien ? Peut-être. Ce visage reste. Il prend de la place. Puis il s’impose. Ce n’est plus le mien. C’est peut-être le souvenir de ce chamelier rencontré dans le désert du thar. Ou celui d’un voyageur un peu las. Peut-être un sadhu sans barbe, un ouïghour ou même Gohar, ce philosophe devenu le « mendiant orgueilleux » d’Albert Cossery. Cet homme est en route. Il quitte sa terre, bon gré ou mal gré. Elle raconte une histoire, celle d’une humanité en chemin. La couleur évolue au cours de cette série. Elle finit par être monochrome. Acrylique puis huile et mine de plomb. A mesure que le personnage prend du corps, les couleurs s’estompent. L’aridité s’installe. Le désert chaud et lourd gagne du terrain.

 
Je renoue avec la gravure au début de cette série. Je fais des impressions de plaque. Celles qui ne me conviennent pas finissent en lambeaux collées sur des grands morceaux de toiles. Lambeaux d’estampes comme prémices à une histoire qui s’impose à moi. A mesure que le personnage se précise, son portrait s’installe sur mes plaques de rhénalon et de zinc. Je grave, comme si j’esquissais un dessin : quelques traits au burin et à la pointe sèche. C’est après l’étape de l’encrage que tout se joue.J’essuie l’encre de manière différente à chaque fois. Je crée mes valeurs. Ce qui me permet d’obtenir des tirages très différents. Mon personnage évolue ainsi impression après impression. C’est une estampe (tirage obtenu après le passage à la presse d’une plaque posée sur une feuille humide) mais une estampe monotypée.

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